vendredi 8 janvier 2010
J'avais envie de parler d'un film qui a bercé mon enfance, accompagné mon adolescence, et qui aujourd'hui continue à m'émouvoir et à m'émerveiller.
Le Roi et l'oiseau. Un dessin animé français de Paul Grimault ; textes de Prévert, d'après le conte La Bergère et le ramoneur de Andersen.
Elle raconte comment Charles V+III=VIII+VIII=XVI (Charles XVI, donc), roi de Tachycardie ("il détestait tout le monde, et tout le monde dans le royaume le détestait aussi"), est amoureux de la jolie bergère qui réside dans un tableau. Malheureusement, celle-ci est amoureuse du gentil ramoneur qui réside dans le tableau d'à côté, et c'est réciproque. Un soir, ils s'enfuient de leurs tableaux pour voir le monde, et le roi va tout faire pour les rattraper, avec l'aide de sa police. Ils ne sont pas faits pour être ensemble, la bergère et le ramoneur, d'ailleurs "c'est écrit dans les livres, les rois épousent les bergères"... Et l'oiseau dans tout ça ? L'oiseau est intelligent, ingénieux, il a fait le tour du monde, est polyglotte, et a quatre petits oisillons. L'oiseau fera tout pour aider le couple à échapper à la police du roi... "Allô, allô, forte récompense, allô, allô, une charmante bergère et un petit ramoneur de rien du tout, de rien du tout, sont recherchés par la police de sa majesté, Charles V+III=VIII+VIII=XVI". A noter une scène de course poursuite absolument magnifique, dans d'interminables escaliers.
L'humour est présent tout au long des quelques 90 minutes du film et si, petite, j'ai été séduite par la poésie de l'histoire, j'ai plus tard saisi toutes les évocations historiques présentes dans le film. Par exemple, à un moment, on voit un portrait du Roi, le même que le portrait officiel de Louis XIV, dans son manteau d'hermine (que tout le monde a sans doute étudié au lycée) ; mais ce n'est qu'un exemple, et ils sont nombreux. D'ailleurs, il entre tout à fait dans le contexte politique actuel =D (cf. le deuxième extrait que j'ai mis à la fin).
Il y a une profondeur, plusieurs niveaux de lecture. Tout y est parfait, le traitement de l'histoire, la bande son, et de nombreux détails graphiques à découvrir et redécouvrir.
Parmi les personnages les plus touchants de cette histoire, en dehors des protagonistes principaux, il y a un aveugle, qui joue de l'orgue de Barbarie, dans la ville basse. Là où vivent les pauvres, les parias, les exclus de la société, et où la lumière du jour ne filtre pas. Les deux amoureux s'y retrouvent après avoir dévalé des escaliers, en s'enfonçant dans les profondeurs... et là...
L'Aveugle : Qu'est-ce qu'il y a ?
Un vieux : Des nouveaux !
L'Aveugle : Comment sont-ils ?
Un vieux : Un garçon et une fille, avec des cheveux blonds et des yeux bleus, tous les deux.
L'Aveugle : Jeunes ?
Un vieux : Tout jeunes !
L'Aveugle : Bonjour, enfants. Qui êtes-vous ? D'où venez-vous ? Vous apportez des nouvelles ? Est-ce vrai que le monde existe ? Est-ce vrai que le Soleil brille ?
La Bergère et le Ramoneur : Oui, c'est vrai. Nous l'avons vu.
L'Aveugle : Comment est-il ?
Le Ramoneur : Il brille. Il est tout jaune !
La Bergère : Il est doré quand il se lève ; et tout rouge quand il se couche.
Le Ramoneur : Et la Lune aussi nous l'avons vue. Et nous pouvons vous dire comment ça marche !
La Bergère : L'Oiseau nous a tout expliqué !
L'Aveugle : L'Oiseau ! Ils ont vu aussi un oiseau ! Je vous l'avais dit les amis : nous sommes sauvés ! Le monde existe ! Le Soleil brille ! Et il y a aussi des oiseaux ! Ah ! la vie est belle ! Nous verrons tout cela un jour ! En avant la musique !
Et l'aveugle de jouer de son orgue qui, lui aussi, jouera un rôle dans ce conte...

Pour le plaisir des yeux, un passage du film. Et puis un autre. :)